Sunday, March 25, 2007

LIBAN, 'A LA RECHERCHE DE L'IDENTITÉ PERDUE'



Semaine du 26 mars au 1er avril 2007





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L’icône et l’islam : Pamela Chrabieh
Émission Second Regard,
3 décembre 2006, Radio Canada
Un reportage de Jean-Robert Faucher
Merci Robert et à toute l'équipe de Second Regard!
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De Philippe Martin:
'Voici la onzième édition des portraits de blogueurs, avec Pamela Chrabieh Badine'.

On peut trouver l'entrevue sur Dailymotion, Cent Papiers et YULBUZZ.
Merci à Philippe et Christian Aubry!

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En cette fin du mois de mars 2007, la recherche d'une solution à la crise Libanaise se poursuit, avec des facteurs-ingérences étrangers qui tantôt la favorisent et d'autres fois l'handicapent. La division des Libanais-es en plusieurs factions (dont les pro-gouvernement et les pro-opposition) constitue, selon le patriarche maronite Mar Nasrallah Boutros Sfeir, "la chose la plus grave qui puisse atteindre le pays dans son entité", puisque cette division s'intensifie avec les mois et ne semble pas vouloir laisser la place à une entente-consensus à long terme. Et plus cette division s'accroît, plus la crise perdure, et l'identité Libanaise est ballottée entre des intérêts politiques locaux et internationaux, diluée dans un marasme de tensions, d'exclusions, de haine et de rejet; une identité prise dans l'étau de la culture de la guerre sévissant au Liban depuis des décennies.
Il est vrai que l'avenir du Liban et son identité dépendent en partie des conjonctures étrangères (selon Michel Touma, "Le visage du Liban de demain, son rôle, sa vocation dans ce Moyen-Orient en pleine mutation dépendront dans une large mesure de l’évolution, et de l’aboutissement, de ces diverses motivations qui dictent l’action des acteurs qui se bousculent sur la scène libanaise", dans l'Orient-le-Jour, 26 mars 2007) , mais en large partie des Libanais eux-mêmes, et en particulier des jeunes générations se trouvant au Liban et ailleurs (ces jeunes lesquels pour Michel Touma poussent un cri de colère et un sentiment de révolte et de frustration, voire de répugnance face à la situation présente).


"Ce dont le pays et les jeunes ont besoin, dans le contexte actuel, ce ne sont sûrement pas des solutions boiteuses, « à la libanaise », pour sortir de la crise. Maintenant que les dés sont jetés, que tous les dossiers sont ouverts, en toute franchise, sans complaisance ni distorsion, n’est-il pas grand temps que les Libanais planchent, selon une approche radicale, sur la détermination de l’identité et du rôle de leur pays, qu’ils s’entendent enfin sur la physionomie de leur système politique ? N’est-il pas temps que les jeunes et les acteurs de la société civile se voient offrir l’opportunité de ne plus broyer du noir et de contribuer à la recherche de l’équilibre libanais et de l’identité nationale trop longtemps perdus dans les méandres de la politique politicienne ?(...) Les Libanais ont suffisamment enduré. Tous les abcès ont été crevés. Les pôles politiques, les intellectuels, les cadres supérieurs ont désormais l’audace de poser les problèmes tels qu’ils se présentent, sans complaisance. Les jeunes attendent avec anxiété de pouvoir surmonter leur désespoir, leur révolte, leur colère. Dans le sillage de la révolution du Cèdre, il est donc grand temps de s’atteler à la recherche de l’identité perdue".

Je n'irai pas jusqu'à affirmer comme le fait Michel Touma que cette identité est 'perdue'; à mon avis, le processus de sa construction-reconstruction se poursuit, mais non sans écueils et obstacles. D'ailleurs, quelle identité nationale à travers le monde s'est-elle édifiée sans larmes?
De plus, il n'est pas nécessaire qu'on aboutisse à une identité nationale unicitaire pour que l'on puisse parler d'identité 'trouvée' ou 'retrouvée'; l'identité Libanaise, forgée tout au long de milliers d'années, est plurielle et extrêmement riche de par sa diversité. Reste à trouver une mailleure formule qui gèrerait cette diversité.

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Ci-dessous un article sur l'affaire Habtoor (je réponds ainsi par quelques clarifications à un commentaire qui me fut envoyé la semaine passée par Sami concernant ce grand investisseur des Émirats arabes unis au Liban):

L’image du Liban écornée par l’émirati Al Habtour

26 mars 2007
Web Manager Center

Confronté en tant qu’investisseur à de multiples tracas au Liban, Khalaf Al Habtour brandit la menace d’un recours contre l’Etat libanais devant la Commission des Nations unies pour le Droit Commercial International et le Centre International pour le Règlement des Litiges d’Investissement. «Je suis venu dans ce pays en tant qu’investisseur croyant profondément dans ses lois et sa constitution. Mais malgré l’existence du cadre politique et légal, l’application de la loi est l’objet d’une grande interrogation. Les investissements nationaux et étrangers au Liban ont subi d’énormes pertes du fait de l’instabilité politique, économique et sociale causée par la composition actuelle du régime. Le pays est frappé d’une sorte de paralysie du fait des manifestations et grandes marches à répétition organisées par tous les acteurs politiques. Ce qui empêche le déroulement normal de la vie et déstabilise l’économie. D’autant que l’Etat a échoué à maîtriser la situation».

Ce cri d’alarme a été lancé par l’homme d’affaires émirati Khalaf Al Habtour, mercredi 21 mars, à l’aéroport de Beyrouth. Ce magnat de la construction, né à Dubai, en 1950, a investi à ce jour près de 500 millions de dollars au Liban. Il y possède le Metropolitan Palace, gigantesque hôtel cinq étoiles, un complexe résidentiel, le "Jamhour Village", les grands magasins Metropolitan City Center et le parc d'attraction Metropolitan Park.

Pour cet homme d’affaires, l’Etat «doit créer les bases de la paix dans le pays, garantir la justice pour tous et la sécurité aux investisseurs». Ce qui, d’après lui, n’est pas en train de se faire au Liban.

En effet, l’investisseur émirati a plus d’un grief à l’encontre de l’Etat libanais. D’abord, la paralysie du pays. Tout en reconnaissant que «les protestations, les manifestations et les actions terroristes se produisent partout et pas seulement au Liban», Khalaf Al Habtour constate une différence : «les autres pays n’entrent dans une phase de paralysie totale ; les commerces n’y ferment pas et les hôtels ne sont pas vides». Aussi, l’homme d’affaires émirati tire-t-il la conclusion que le Liban «a besoin d’une direction forte, puisque le bateau ne peut pas supporter plus d’un timonier», alors qu’il se distingue par un «éparpillement de ses directions». Et circonstance aggravante, «les institutions locales et les administrations de l’Etat fonctionnent comme des autorités indépendantes».

Ensuite, Khalaf Al Habtour reproche aux autorités libanaises de lui réclamer «des impôts injustifiés, dont personne ne nous a parlés lorsque nous sommes venus investir au Liban».

De même, la justice libanaise est un autre motif de récrimination pour l’homme d’affaires. A ce sujet, Khalaf Al Habtour fait état de «réserves concernant certains juges», car certaines de ses sociétés ont fait l’objet «d’actes suscitant de grandes interrogations». Des actes dont l’investisseur a «immédiatement informé le président de la République, le Président du Conseil des ministres et le Procureur général, sans que personne ne prenne la moindre décision contre ces juges». Et Khalaf Al Habtour d’ajouter que, en raison de «cet environnement défavorable à l’investissement au Liban, certains investisseurs arabes et libanais m’ont demandé de se joindre à eux pour porter plainte contre l’Etat libanais devant la Commission des Nations unies pour le Droit Commercial International et le Centre International pour le Règlement des Litiges d’Investissement». Mais après avoir dans un premier temps «convaincu» ses interlocuteurs de différer le recours à ces instances, Khalaf Al Habtour brandit la menace d’un passage à l’acte en se demandant s’il pourra retenir plus longtemps les investisseurs qui veulent en découdre avec l’Etat libanais.
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Ci-dessous un article très intéressant sur la possibilité - ou l'impossibilité - d'une guerre civile au Liban:

Another Civil War in Lebanon? Will Hezbollah Hand Israel Its 6th Defeat?

25-03-2007, Counterpunch

Franklin Lamb - A recent poll in Lebanon suggests deep pessimism about the chances of avoiding another civil war. Plenty of 'wise owls' here think civil war is just a matter of time. No less an oracle than Tarek, the doorman at the Alexandria Hotel in Ashrafiyeh, where the Israeli Military Command had it's HQ during its 1982 invasion says Civil war is certain. So does the sous-chef at Chez Paul's where Sharon, Bashir Gemayel and Eli Hobeika used to meet and discuss 'business'. And many in Lebanon's Parliament agree.
For months now large wooden crates have been arriving in various locals in East Beirut and the mountains and hurriedly carried into buildings and various party Headquarters, in violation of the 1989 Taif Accords which required local militias to disarm (Rafik Hariri exempted Hezbollah from Taif arguing that Hezbollah was not a militia but the Lebanese resistance force since it only used its weapons against Israel).
What's in those boxes? Are they weapons? If so, who paid for them? Hard to blame Iran and Syria this time since the recipients are their sworn enemies and are itching to fight them both, or more precisely, have Israel or the US act on their behalf. What about all that promised Bush administration cash and weaponry to shore up the Siniora regime? More than 200 million worth? It there a glitch with the shipping agent and is some of it is going to local addresses other than the "new robust Lebanese army"?
To know for sure, one would want to walk around the Gemezzeh neighborhood in east Beirut around 2 in the morning near the rebuilt Phalange Party HQ.where Baschir Gemeyal was blown up on September 14, 1982 and nose around a bit..
And what's that frenetic activity behind the Walid Jumblatt's estate at El Moukhtara in the Chouf? It has increased since his long meeting with GW Bush a couple of weeks ago.
And those fine new military style boots and swagger one sees among some of Saad Hariri's March 14 movement young men. Armani or US Army or Israeli issue?

Civil war may well be coming to Lebanon and there is currently plenty of sectarian tension and hatred in Lebanon . Some surfaced in late January when three Hezbollah supporters were killed. When the beautiful widow and young children of 29 year old Adnan Shamas, who was ambushed as he walked home following a visit to the opposition created 'tent city' in downtown Beirut, appeared at his funeral there were calls of "blood for blood."
Sabra-Shatilla massacre participant Samir Geagea, now the leader of the Lebanese Forces Militia and recently feted in Washington DC, beats his chest and taunts Hezbollah's Secretary-General with threats like "Don't you dare think Hassan Nassrallah that Beirut is Haifa (referring to the July War) or else Lebanon is headed for the worst."
Some in the opposition dismiss the Siniora government as nothing more than 'an organized crime syndicate that wants to turn Lebanon into another Iraq,' as Talal Arslan, an anti-government Druze leader (breaking ranks with Jumblatt) recently roared. Many accuse the government of functioning as agents of Israel and the Bush administration and demand early elections and a greater share of government posts for the growing anti-government coalition.

Other observers are concluding that Israel and the Bush administration must foment a civil war in order not to 'lose' Lebanon and be driven from the region.

Pro-Israel "tink tanks" (Robert Fisk's label) argue that having created a disaster for both the US and Israel in Iraq and Afghanistan, and having failed miserably to destroy, much less seriously damage. Hezbollah during the July War, both Olmert and Bush desperately need a Lebanese civil war.

Their reasoning is that if Bush and Olmert can provoke Hezbollah into turning its guns on Lebanese rivals, which it has never done and refuses to do,(Nasrallah recently declaring that "they can kill 1,000 of the opposition and we will still refuse to participate in a civil war") the US and Israel can invade, destroy the Lebanese resistance and set up another 'more sustainable' government, to borrow a pet term from Condoleezza Rice.

Other objectives expected to be achieve by another Lebanese Civil War are to restore Israel's deterrent credibility, intimidate the region and occupied territories, create a opening to attack Syria and conceivably go for a spectacular Trifecta and bomb Iran as well.

The other side of the coin.

Hassan Nassrallah and his allies have vowed to prevent a Civil War. In this goal they have the support of elements (if not a majority) in all the confessions and political parties.
Hezbollah has a habit to defeating Israel on the battle field and increasingly in political circles and they may just prevail in preventing a civil war.

Five brief examples:

1. The April 30, 1985 Israel withdrawal from Sidon, Tyre, Nabatieh, and some Western Bekaa villages were the direct result of military pressure from a new organization which was publicly announced on February 16, 1985 and calling itself Hezbollah. Interestingly the same day Hezbollah went public Israel began its withdrawal and it was Hezbollah's first victory over the Israeli military.

2. July 1993. Israel's "operation accountability". Same Israeli goals. Destroy Hezbollah, break its connection with the populace and pressure the Lebanese government to fight Hezbollah. The UN counted 1,224 air raids and more than 28,000 shells fired into Lebanon by Israel, killing more than 150 civilians, wounding more than 500 and displacing more than 200,000 from 120 south Lebanon villages. In retaliation Hezbollah fired Katusha rockets for 10 hours into Galilee settlements creating what Agence France Press of July 25, 1993 called a 'hell of shelling" Israel had enough and contacted Washington to arrange a ceasefire.

3. April 11, 1996 Israel's 'Operation Grapes of Wrath'. Same Israeli goals. Israel attacked Tallat al-Kayyal in Baalbek and expanded its attack the next against the Lebanese army base in Tyre and neighborhoods in Beirut. Israel killed more than 250 civilians. Hundreds of thousands were displaced, more than 7,000 homes partially or completely destroyed.

Hezbollah had planned well and Katyusha rockets were fired on Israeli forces and settlements on a daily basis. As in 1993, Israel asked the Clinton administration to have Warren Christopher arrange a ceasefire which began at 6 pm on April 27, 1996. Hezbollah's victory cost Shimon Peres, Clinton's candidate, to lose the May 29, 1996 Israeli election. Interestingly on March 23, 2007 Peres acknowledged before the Winograd Commission looking into Israel's performance in the July War, that he would not have invaded Lebanon and tried to defeat Hezbollah in July of 2006. Peres told the Commission: "We can't defeat Hezbollah unless we burn every inch of Lebanon".

4. May 24, 2000. After 22 years of occupying more than 10% of Lebanon, Hezbollah forced Israel to withdraw from all but the Shebaa farms in one night, abandoning its planned phased withdrawal as well as its agents, the South Lebanon's Army. Contrary to Israeli scare tactics, there was no Hezbollah retaliation against Lebanese collaborators. This fact earned Hezbollah the respect of all Lebanon's confessions, not least, the Christian community.

5. Hezbollah's victory in the 2006 July war is common knowledge and discussed in the new volume: The Price We Pay: A Quarter Century of Israel's use of American Weapons in Lebanon, available at ngolebanon@aol.com.

The consequences of these five Israeli defeats have been unacceptable for Israel. Its invincibility myth is now the butt of late night TV jokes. The Hezbollah led Lebanese resistance has caught the imagination of much of the World including the occupied Palestinian territories. Israel and the Bush administration believe the only solution is another Civil War Lebanon so they can destroy Hezbollah. As former US envoy John Bolton made clear to the BBC on March 22, 2007 he also favors 'another round'.

Bolton is aware of the recent reports sent to the US Senate Intelligence Committee in February, 2007 which suggests that the CIA believes Israel may well cease to exist in its current form by the centenary of the 1947-48 Nakba which led to the establishment of the Jewish state. The Report predicts a significant increase in the current emigration from Israel mainly to the US, Western Europe and Russia and continuing decline in immigration to Israel. Bolton blames Hezbollah. But a Congressional staff member offered the CIA view on March 21, 2007:

"History teaches us that resistance eventually trumps occupation every time and Israel has never seriously considered a just peace with the Palestinians or its Arab neighbors. There is no rational reason to think that they will now. It's the Masada syndrome. Fanatics run Israel and they would rather destroy themselves than give back what they stole from the Palestinians".

"Persia rising, Zionism sinking"! As another Congressional staff member put it.

As Israel continues its nearly daily violations of Lebanese sovereignty, the main concern of the US Intelligence analysts is not a nuclear Iran, but rather how to get Israel's finger off its 350+ nuclear warheads. Some US Defense Intelligence Agency analysts believe that Israel will indeed try to use its arsenal and that a nuclear holocaust is likely.

Rapture seeking Christian fundamentalists told the March 2007 AIPAC conference in Washington DC that when this happens it will be God's will and any surviving Jews will then convert to Jesus or burn in hell. Either way works for them.

Few in the US intelligence community doubt that if Israel fires its nuclear arsenal that their targets will include America. Why would Israel not spare the US after 60 years of support including total aid in excess of one trillion dollars? The reason is because Israel sees the American public as getting " all wobbly" (read: slightly more informed thanks to the diligent efforts of dozens of courageous pro-Palestinian/pro Arab and pro Peace interest groups in the US as well as the Iraq catastrophe) and will sooner rather than later, dump Israel.

Freezing Israel's nuclear trigger is the question of the hour. Meanwhile, Israel and the Bush administration continue trying to ignite an Iraq style Civil War in Lebanon. Hezbollah and their Christian and Muslim allies are trying to prevent one. Which side will prevail?

Ladies and gentlemen, the bell has sounded for Round Six: Israel vs. Hezbollah. The arena is holding its collective breadth. The outcome is uncertain. To date the score is Hezbollah 5, Israel 0. On the issue of a Civil War in Lebanon, place your bets please.




Tuesday, March 20, 2007

Opposition et gouvernement - Conflit au Liban

LE BLOCAGE DE L'ENGRENAGE

Semaine du 19-25 mars 2007





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L’icône et l’islam : Pamela Chrabieh
Émission Second Regard,
3 décembre 2006, Radio Canada
Un reportage de Jean-Robert Faucher
Merci Robert et à toute l'équipe de Second Regard!
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De Philippe Martin:
'Voici la onzième édition des portraits de blogueurs, avec Pamela Chrabieh Badine'.

On peut trouver l'entrevue sur Dailymotion, Cent Papiers et YULBUZZ.
Merci à Philippe et Christian Aubry!

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Le 'blocage de l'engrenage'. Voici une expression bien particulière proférée par mon mari Nicolas en ce matin du 20 mars 2007, suite à la 'prise d'assaut' du Parlement Libanais par des parlementaires du bloc pro-gouvernement - exigeant la réouverture des sessions parlementaires pour l'année 2007 - et la position 'défensive' des députés du bloc pro-opposition. On pensait pourtant que les pourparlers entre le gouvernement et l'opposition se dirigeaient dans la bonne voie (voire les rencontres à Aïn el-Tiné, entre le Président du Parlement, Nabih Berri, représentant de l'opposition, et le chef du Courant du futur, Saad Hariri, représentant le gouvernement)... L'engrenage du jeu politique Libanais se bloque de plus en plus et rien ne semble y remédier: ni les initiatives externes (bien que le secrétaire de la Ligue arabe, Amr Moussa, reprend sa médiation dans le but de favoriser, avant le sommet arabe du 28 mars, une rencontre saoudo-syrienne qui pourrait, si elle a lieu, se répercuter positivement sur le dossier libanais), ni celles internes. Or, plus il y a blocage, plus le mécanisme chauffera, et finalement explosera (en d'autres termes, entre le blocage de l'engrenage du jeu politique et l'engrenage de la violence, voire du conflit, il n'y a qu'un fil qui tienne); et ce ne sont pas les mathématiques qui vont pouvoir résoudre le problème, mais une société, un peuple et une nation spécialisés dans la gestion de l'engrenage de manière à le lubrifier et le tailler à leur mesure, non à la mesure des ambitions régionales et internationales! Cette gestion est nécessaire, surtout que le passage du temps semble vain face aux morales douteuses qui pervertissent l'être humain lorsqu'il s'engage dans le jeu politique et entretient dramatiquement l'engrenage du pire - et comme exemple du pire, quoi de plus adéquat que la réalité irakienne que certains semblent vouloir exporter au Liban ...! Bagdad brûle et se meurt, et ce sera bientôt le tour de Beyrouth, pour la ènième fois!

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Quatre ans après, Bagdad brûle toujours
L'article de Rania MASSOUD
(L'Orient-le-Jour, Beyrouth, 20 mars 2007)

Quatre ans après le déclenchement de la guerre américaine contre l’Irak, l’on se demande toujours si la décision de George W. Bush était la bonne. Depuis la date fatidique du 20 mars 2003 jusqu’à ce jour, rares sont les « bonnes » nouvelles qui nous parviennent de Bagdad. Il y a certes eu la chute d’un régime dictatorial, la capture de Saddam Hussein, la tenue d’élections démocratiques et libres et surtout la mort du chef de la branche irakienne d’el-Qaëda, Abou Moussab al-Zarkawi.
Mais la liste semble relativement courte face à l’ampleur de la catastrophe humanitaire et des carnages confessionnels qui font désormais le quotidien de ce pays. Entre 100 000 et 150 000 civils irakiens auraient trouvé la mort depuis le début de la guerre. Ces estimations effrayantes ont été dévoilées en novembre 2006 par le ministère irakien de la Santé. Pour la seule année 2006, plus de 34 000 personnes ont été tuées. Un rapport du Pentagone, récemment publié, indique que les attaques meurtrières en Irak ont atteint leur pic fin 2006. L’ONU estime qu’en moyenne près de 100 Irakiens sont tués chaque jour. En un mot comme en mille, l’Irak est plus que jamais livré à la violence et au chaos.
Dans l’ouest et le nord du pays, el-Qaëda poursuit son insurrection brutale contre le gouvernement irakien et les forces américaines, tandis que dans le sud, les milices chiites rivalisent pour le contrôle des régions et des ressources pétrolières.
La guerre a également poussé des millions d’Irakiens à quitter leurs foyers pour se réfugier dans des pays voisins comme la Syrie, la Jordanie et le Liban. En quatre ans, l’UNHCR a enregistré plus de 4 millions de déplacés. Ce chiffre représente le plus grand déplacement de personnes au Moyen-Orient depuis la crise palestinienne de 1948.
La situation sécuritaire en Irak s’est tellement détériorée ces dernières années que les médias internationaux n’hésitent pas à utiliser le terme de « guerre civile ». Dans son dernier rapport, le Pentagone a cependant jugé que ce terme ne permet pas de saisir la complexité du conflit, qui inclut des violences confessionnelles mais aussi des attaques contre les forces de la coalition. Pour Washington, comme la majorité des attaques vise principalement les forces de la coalition, il n’est donc pas question de « guerre civile » en Irak.
Mais comment alors expliquer les centaines d’attentats confessionnels contre des marchés populaires ou des mosquées dans des régions majoritairement chiites ? Comment expliquer les attaques contre les places publiques, les universités et les hôpitaux ? Désormais, plus aucune des nouvelles qui nous parviennent d’Irak – aussi scandaleuse qu’elle soit – ne nous surprendra. Même les ambulances ont été piégées. L’ONU parle de « torture généralisée » en Irak.
Par ailleurs, aux États-Unis, un quart des soldats américains soignés à leur retour d’Irak souffrent de troubles mentaux. Une étude américaine récente établit que plus de 55 % des soldats diagnostiqués présentent plus d’une maladie mentale.
Face à ces données alarmantes, le président américain ne recule pourtant pas et décide d’envoyer 25 000 soldats supplémentaires en Irak. Les forces américaines qui ont perdu plus de 3 000 de leurs membres depuis 2003 devraient compter 160 000 soldats d’ici à juin.
Vendredi dernier, le Premier ministre français, Dominique de Villepin, a déclaré que la guerre en Irak a « brisé l’image de l’Amérique » tout en soulignant « qu’aucun pays ne peut aujourd’hui imposer seul un nouvel ordre mondial ». Avec le déclenchement de la guerre contre le régime baassiste irakien, non seulement le « rêve américain » a été brisé, mais les États-Unis ont également perdu le respect de nombreux Arabes, Européens, Asiatiques et – même – Américains qui ont manifesté par centaines de milliers le week-end dernier à Washington, New York, Séoul, Tokyo, Ankara et Athènes pour réclamer la fin de la guerre.
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Robert Fisk: US power games in the Middle East

As the West looks anxiously at Iraq and Afghanistan, dangerous cracks are opening up in Lebanon ­ and the White House is determined to prop up Fouad Siniora's government

Published: 19 March 2007 (The Independant)

The spring rain beat down like ball-bearings on the flat roof of General Claudio Graziano's office. Much of southern Lebanon looked like a sea of mud this week but all was optimism and light for the Italian commander of the United Nations Interim Force in Lebanon, now 11,000 strong and still expecting South Korea to add to his remarkable 29-nation international army. He didn't recall how the French battalion almost shot down an Israeli jet last year - it was before his time - and he dismissed last month's border shoot-out between Israeli and Lebanese troops.

No specific threats had been directed at Unifil, the UN's man in southern Lebanon insisted - though I noticed he paused for several seconds before replying to my question - and his own force was now augmented by around 9,000 Lebanese troops patrolling on the Lebanese-Israeli frontier. There was some vague talk of "terrorist threats ... associated with al-Qa'ida" - UN generals rarely use the word 'terrorism', but then again Graziano is also a Nato general -- yet nothing hard. Yes, Lebanese army intelligence was keeping him up to date. So it must have come as a shock to the good general when the Lebanese Interior Minister Hassan Sabeh last week announced that a Lebanese Internal Security Force unit had arrested four Syrian members of a Palestinian "terrorist group" linked to al-Qa'ida and working for the Syrian intelligence services who were said to be responsible for leaving bombs in two Lebanese minibuses on 13 February, killing three civilians and wounding another 20.

Now it has to be said that there's a lot of scepticism about this story. Not because Syria has, inevitably, denied any connection to Lebanese bombings but because in a country that has never in 30 years solved a political murder, it's pretty remarkable that the local Lebanese constabulary can solve this one - and very conveniently so since Mr Sabeh's pro-American government continues to accuse Syria of all things bestial in the state of Lebanon. According to the Lebanese government - one of those anonymous sources so beloved of the press - the arrested men were also planning attacks on Unifil and had maps of the UN's military patrol routes in the south of the country. And a drive along the frontier with Israel shows that the UN is taking no chances. Miles of razor wire and 20ft concrete walls protect many of its units.

The Italians, like their French counterparts, have created little "green zones" - we Westerners seem to be doing that all over the Middle East - where carabinieri police officers want photo identity cards for even the humblest of reporters. These are combat units complete with their own armour and tanks although no-one could explain to me this week in what circumstances the tanks could possibly be used and I rather suspect they don't know. Surely they won't fire at the Israelis and - unless they want to go to war with the Hizbollah - I cannot imagine French Leclerc tanks are going to be shooting at the Middle East's most disciplined guerrilla fighters.

But Unifil, like it or not, is on only one side of the border, the Lebanese side, and despite their improving relations with the local Shia population -- the UN boys are going in for cash handouts to improve water supplies and roads, "quick impact projects" as they are called in the awful UN-speak of southern Lebanon - there are few Lebanese who do not see them as a buffer force to protect Israel. Last year's UN Resolution 1701 doesn't say this, but it does call for "the disarmament of all armed groups in Lebanon". This was a clause, of course, which met with the enthusiastic approval of the United States. For "armed groups", read Hizbollah.

The reality is that Washington is now much more deeply involved in Lebanon's affairs than most people, even the Lebanese, realise. Indeed there is a danger that - confronted by its disastrous "democratic" experiment in Iraq - the US government is now turning to Lebanon to prove its ability to spread democracy in the Middle East. Needless to say, the Americans and the British have been generous in supplying the Lebanese army with new equipment, jeeps and Humvees and anti-riot gear (to be used against who, I wonder?) and there was even a hastily denied report that Defence Minister Michel Murr would be picking up some missile-firing helicopters after his recent visit to Washington. Who, one also asks oneself, were these mythical missiles supposed to be fired at?

Every Lebanese potentate, it now seems, is heading for Washington. Walid Jumblatt, the wittiest, most nihilistic and in many ways the most intelligent, is also among the most infamous. He was deprived of his US visa until 2005 for uncharitably saying that he wished a mortar shell fired by Iraqi insurgents into the Baghdad "green zone" had killed then- Deputy Defence Secretary Paul Wolfowitz. But fear not. Now that poor old Lebanon is to become the latest star of US foreign policy, Jumblatt sailed into Washington for a 35-minute meeting with President George Bush - that's only 10 minutes less than Israeli prime minister Ehud Olmert got - and has also met with Condi Rice, Dick Cheney, Defence Secretary Gates and the somewhat more disturbing Stephen Hadley, America's National Security Adviser. There are Lebanese admirers of Jumblatt who have been asking themselves if his recent tirades against Syria and the Lebanese government's Hizbollah opponents - not to mention his meetings in Washington - aren't risking another fresh grave in Lebanon's expanding cemeteries. Brave man Jumblatt is. Whether he's a wise man will be left to history.

But it is America's support for Fouad Siniora's government - Jumblatt is a foundation stone of this - that is worrying many Lebanese. With Shia out of the government of their own volition, Siniora's administration may well be, as the pro-Syrian President Emile Lahoud says, unconstitutional; and the sectarian nature of Lebanese politics came violently to life in January with stonings and shooting battles on the streets of Beirut.

Because Iraq and Afghanistan have captured the West's obsessive attention since then, however, there is a tendency to ignore the continuing, dangerous signs of confessionalism in Lebanon. In the largely Sunni Beirut suburb of Tarek al-Jdeide, several Shia families have left for unscheduled "holidays". Many Sunnis will no longer shop in the cheaper department stores in the largely Shia southern suburb of Dahiya. More seriously, the Lebanese security forces have been sent into the Armenian Christian town of Aanjar in the Bekaa Valley after a clump of leaflets was found at one end of the town calling on its inhabitants to "leave Muslim land". Needless to say, there have been no reports of this frightening development in the Lebanese press.

Aanjar was in fact given by the French to the Armenians after they were forced to leave the city of Alexandretta in 1939 - the French allowed a phoney referendum there to let the Turks take over in the vain hope that Ankara would fight Hitler - and Aanjar's citizens hold their title deeds. But receiving threats that they are going to be ethnically cleansed from their homes is - for Armenians - a terrible reminder of their genocide at the hands of the Turks in 1915. Lebanon likes its industrious, highly educated Armenians who are also represented in parliament. But that such hatred could now touch them is a distressing witness to the fragility of the Lebanese state.

True, Saad Hariri, the Sunni son of the murdered ex-prime minister Rafik Hariri, has been holding talks with the Shia speaker of parliament, Nabi Berri - the Malvolio of Lebanese politics - and the Saudis have been talking to the Iranians and the Syrians about a "solution" to the Lebanese crisis. Siniora - who was appointed to his job, not elected - seems quite prepared to broaden Shia representation in his cabinet but not at the cost of providing them with a veto over his decisions. One of these decisions is Siniora's insistence that the UN goes ahead with its international tribunal into Hariri's murder which the government - and the United States - believe was Syria's work.

Yet cracks are appearing. France now has no objections to direct talks with Damascus and Javier Solana has been to plead with President Bashar Assad for Syria's help in reaching "peace, stability and independence" for Lebanon. What price the UN tribunal if Syria agrees to help? Already Assad's ministers are saying that if Syrian citizens are found to be implicated in Hariri's murder, then they will have to be tried by a Syrian court - something which would not commend itself to the Lebanese or to the Americans.

Siniora, meanwhile, can now bask in the fact that after the US administration asked Congress to approve $770m for the Beirut government to meet its Paris III donor conference pledges, Lebanon will be the third largest recipient of US aid per capita of population. How much of this will have to be spent on the Lebanese military, we still don't know. Siniora, by the way, was also banned from the United States for giving a small sum to an Islamic charity during a visit several years ago to a Beirut gathering hosted by Sayed Hussein Fadlallah, whom the CIA tried to murder in 1985 for his supposed links to the Hizbollah. Now he is an American hero.

Which is all to Hizbollah's liking. However faithful its leader, Sayed Hassan Nasrallah, may be to Iran (or Syria), the more Siniora's majority government is seen to be propped up by America, the deeper the social and political divisions in Lebanon become. The "tink thank" lads, as I call them, can fantasise about America's opportunities. "International support for the Lebanese government will do a great deal for advancing the cause of democracy and helping avoid civil war," David Shenker of the "Washington Institute for Near East Policy" pronounced last week. "... the Bush administration has wisely determined not to abandon the Lebanese to the tender mercies of Iran and Syria, which represents an important development towards ensuring the government's success," he said.

I wouldn't be too sure about that. Wherever Washington has supported Middle East "democracy" recently - although it swiftly ditched Lebanon during its blood-soaked war last summer on the ridiculous assumption that by postponing a ceasefire the Israelis could crush the Hizbollah - its efforts have turned into a nightmare. Now we know that Israeli prime minister Olmert had already pre-planned a war with Lebanon if his soldiers were captured by the Hizbollah, Nasrallah is able to hold up his guerrilla army as defenders of Lebanon, rather than provokers of a conflict which cost at least 1,300 Lebanese civilian lives. And going all the way to Washington to save Lebanon is an odd way of behaving. The answers lie here, not in the United States. As a friend put it to me, "If I have a bad toothache, I don't book myself into a Boston clinic and fly across the Atlantic - I go to my Beirut dentist!"




Monday, March 12, 2007

LIBAN: 'La destruction d'une nation

Semaine du 12-18 mars 2007

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L’icône et l’islam : Pamela Chrabieh
Émission Second Regard,
3 décembre 2006, Radio Canada
Un reportage de Jean-Robert Faucher
Merci Robert et à toute l'équipe de Second Regard!
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De Philippe Martin:'Voici la onzième édition des portraits de blogueurs, avec Pamela Chrabieh Badine'.
On peut trouver l'entrevue sur Dailymotion, Cent Papiers et YULBUZZ.
Merci à Philippe et Christian Aubry!

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En ce début de printemps au Liban, marqué par un beau soleil, des pourparlers inter-Libanais, régionaux et internationaux, et l'espoir de l'implantation d'une solution pacifique à la crise Libanaise, le scepticisme est quand même à l'ordre du jour. La menace ne proviendrait pas du Hezbollah (cf. l'article de la semaine précédente: Peut-on penser la fin de l'extrémisme islamique au Liban?) tel que le dépeignent les médias traditionnels internationaux, mais d'extrémismes de toutes formes et couleurs, tant internes qu'externes (menaces israélienne et syrienne, menace états-unienne, al-Qaida, etc.).
En ce sens, je vous conseille de lire l'entrevue suivante faite par le Figaro Magazine avec le reporter de renom Robert Fisk:

Liban : "la destruction d'une nation et d'un peuple"
12 mars 2007

Selon Robert Fisk, spécialiste du Liban, le drame se joue sans répit. Il estime que les menaces proviennent moins du Hezbollah que de groupes sunnites inspirés par al-Qaida.

Installé à Beyrouth et correspondant de guerre pour le quotidien britannique The Independent, Robert Fisk parcourt le Moyen-Orient depuis plus de trente ans.La version française de son best-seller, Pity the Nation, vient d'être publiée et retrace l'histoire tragique du pays du Cèdre*. Selon lui, une chronique de la destruction de la nation libanaise.

Le Figaro Magazine - Quel est votre avis sur la situation au Liban aujourd'hui ?

Robert Fisk - Ce qui a été véritablement détruit par la guerre au Liban, c'est ce sentiment qu'avaient de nombreux Libanais de voir émerger un Etat indépendant. Un sentiment cruellement sacrifié le jour où les puissances occidentales ont abandonné ce pays à son sort face aux bombardements d'Israël à l'été 2006. Le Hezbollah est sorti sensiblement renforcé de l'épreuve de force et son influence dans le pays est grandissante. Cette guerre a creusé le fossé entre les chiites et les sunnites et divisé encore plus la société libanaise.
La principale menace aujourd'hui au Liban, c'est le risque de voir des groupes sunnites, inspirés par al-Qaida, s'en prendre aux Casques bleus stationnés dans le sud du pays.Il y a maintenant au Liban des contingents français, espagnols, italiens, turcs et des forces navales allemandes. Soucieux de ne pas être accusé d'attaquer la Finul, le Hezbollah, doté d'un service de renseignement humain très efficace, surveille de près les sunnites. Dans chaque village, au Sud-Liban, et dans le quartier chiite de Beyrouth, il dispose d'un réseau d'informateurs pour collecter l'information au plus près. De plus, la dernière guerre a montré les capacités d'espionnage de la guérilla chiite. Au début du conflit, le Hezbollah a utilisé un drone en territoire israélien pour obtenir des photos aériennes des positions ennemies. De plus, quand les Israéliens ont pénétré au Sud-Liban, ils ont retrouvé leurs propres photos satellites identifiant des caches d'armes dans les bunkers du Hezbollah...Il y aussi le problème des bombes à fragmentation lancées par Israël dans le sud du pays après l'annonce du cessez-le-feu. Selon des spécialistes du déminage à l'oeuvre sur le terrain, il faudra peut-être quarante ans pour déminer cette région infestée de bombes. A chaque nouveau conflit, c'est une couche supplémentaire qui s'ajoute !

Le Hezbollah a-t-il un vrai programme politique ? Est-ce un danger pour la démocratie au Liban ?

A mon avis, le Hezbollah est le seul parti, peut-être avec le mouvement du fils de Rafic Hariri, à ne pas être corrompu. Il jouit d'une vraie popularité auprès des habitants chiites du Sud-Liban et de la banlieue sud de Beyrouth. Il a une influence grandissante dans le pays où les chiites sont les opprimés et les dépossédés, toujours ignorés par les chefs et patriarches du gouvernement libanais. Depuis sa naissance en 1982, et jusqu'à aujourd'hui, le Hezbollah a perdu beaucoup de combattants. Il a une carte à jouer après cette crise. D'ailleurs, en public comme en privé, il affirme ne pas vouloir instaurer de république islamique. Aussi, il sera impossible pour le pouvoir de continuer à ignorer le Hezbollah. Il sera nécessaire pour le gouvernement d'ouvrir ses portes aux chiites. Même si, en appelant à la désobéissance civile, le Hezbollah joue avec le feu...

Quelle est votre analyse de la stratégie de Bush, qui entend «remodeler le Moyen-Orient» ?

La politique du président Bush au Moyen-Orient est un véritable échec. La campagne d'Irak s'est transformée en désastre, le conflit israélo-palestinien fait du sur-place et la dernière guerre au Liban n'a fait que détruire le pays. Cette stratégie de «Grand Moyen-Orient» conduit la région dans une nouvelle tourmente. Elle consiste à diviser le monde arabe entre chiites et sunnites, entre chrétiens et musulmans... A l'Ouest, nous aimons diviser ou voir le monde avec des cartes séparant les communautés. Bush parle de démocratie, mais il ne fait que semer la division dans le monde arabe.

Quelle a été votre démarche pour l'écriture de ce livre de près de 900 pages ?

Ce récit est le fruit de plus de trente ans de reportages au Liban et dans le Moyen-Orient. C'est un travail de reporter. Depuis que je couvre la guerre dans cette région en ébullition permanente, j'ai gardé des montagnes de carnets, de coupures de presse, de notes personnelles et de comptes rendus, parfois gribouillés sur des vieux papiers que j'ai conservés dans des sacs de linge et de duty-free à l'aéroport de Beyrouth. La plupart d'entre eux portent sur le Liban, comme une chronique de la destruction d'une nation et d'un peuple sur plusieurs décennies. C'est donc un livre de témoignages, un regard personnel sur l'histoire du Liban, ses espoirs, ses tragédies, ses épisodes sanglants. J'ai toujours pensé le journalisme comme un grand challenge contre les pouvoirs en place. C'est dans cet esprit que je réalise mes enquêtes de terrain, au plus près des acteurs du conflit et des victimes, pour dénoncer les massacres, les oppressions ou les injustices.


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Ireland, Sierra Leone, Uganda and Lebanon: A comparative mayhem
By Michele Chrabieh in Beirut
Friday March 9, 2007


Fractions of Ireland, Sierra Leone and Uganda’s mayhem are exhibited in “The Wind that Shakes the Barley”, “Blood Diamond” and “The Last King of Scotland” now showing in Lebanon’s movie theatres. Regardless of time and space, Lebanon shares with those countries mutual or adjacent denominators: corruption, war, carnage, death and what could be referred to as “The Illusionist”, that is peace itself and not “Eisenheim”.

I have already mentioned in one of my previous texts “The Wind that Shakes the Barley” as I was above all disturbed by the scene where one of the protagonists sentences his own brother to death because their visions of Ireland and freedom spaced out. We, in Lebanon, have always followed a similar pattern and today’s crisis and mutiny- created by the loyalists to the government and the opposition- point out the latter regardless of the several possible solutions and international support and/or interference. We have always misinterpreted and apprehended each other because brothers and sisters believe in different “Lebanons” whether in its foundation or outward appearance.

“Blood Diamond”, alternatively, propels the image of the bloody, corrupt and starving vicious circle many of the third world nations are drowned in while satisfying developed nations’ consumer needs and interests. Maybe Lebanese do not necessarily starve to death like many Africans but we have definitely lived a civil war and a war for others at the price of death, immigration, and economic, social and political crisis.

Finally, in “The Last King of Scotland”, I saw Uganda at the time of Amin Dada’s rule (Coup d’état in 1970), and I saw Dada’s bloodthirsty soul wandering and longing for power and the “discharge” from our planet of any audacious “opposition”. I dare not compare Dada with our leaders, but maybe I should consider it for the sake of our nation.
The last scenes of the movie reminded me of Lebanon as well, and that, mainly in the midst of the 1975-1990 war when the Palestinians high jacked an Israeli plane and landed in “Entebbe”. The Palestinians and the Israelis have always been part of our war and will remain at the core of Lebanon’s problem and ongoing crisis until “The Illusionist” decides to materialize and stick around.

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ANNONCES- NEWS

Soha Béchara de retour au LIBAN.
Résistance et Hezbollah
Une soirée film, discussion et musique...
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MARDI, 20 Mars
Centre culturel Mile End
5390 St-Laurent [coin St Viateur] Montreal
Portes: 19h00
Dons suggérés: 7-10$
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* Film: 'Soha, Retour au pays du Hezbollah' Un reportage télévisé tourné en automne 2006. [français]
* Musique Arabe: Hasan el-Hadi au Oud DJ Leila P. / DJ Kandis
Tadamon! présente la première diffusion publique au Canada du plus récent documentaire télévisé sur Soha Béchara. Au Liban, Soha Béchara est considérée comme l'incarnation même de la résistance nationale contre l'occupation Israélienne du Liban-Sud. Ancienne prisonnière politique dans la tristement célèbre prison de Khiam du Sud Liban, elle en sortira en 1998 après une importante campagne internationale pour sa libération. Des caméras ont suivi la première visite de Soha Béchara au Liban après l'attaque israélienne de juillet 2006. Ce puissant documentaire montre ses interactions et discussions au Liban au sortir de la guerre de cet été, démystifiant le Hezbollah et la résistance libanaise tout en mettant en lumière la complexité de la situation politique du pays. Tadamon! présente ce film dans le but de briser les mythes communs concernant le Liban et la résistance nationale libanaise répandus par le gouvernement canadien et les grands médias. Le Canada considère présentement le Hezbollah comme une organisation "terroriste", alors que le Premier ministre Stephen Harper a qualifié l'attaque israélienne dévastatrice de 2006 contre le Liban de "réponse mesurée". Ce positionnement politique du Canada montre un soutien inconditionnel à l'occupation et l'apartheid israéliens, alors qu'il condamne toute résistance nationale libanaise et palestinienne en criminalisant les mouvements populaires au Moyen Orient et les populations qui les soutiennent au Canada. Joignez-vous à Tadamon! pour cette projection ayant pour objectif de créer un réel espace de débat politique concernant le Hezbollah et le rôle de la résistance nationale libanaise face aux agressions répétées d'Israël.
Info: http://tadamon.resist.ca / 514 664 1036 / tadamon[at]resist.ca

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Lettre ouverte au Peuple des Six Nations
Campagne Citoyenne Palestinienne contre le Mur de l'Apartheid
(par Tadamon)

À l'occasion de l'anniversaire de la Réclamation Territoriale des Six Nations, nous vous exprimons notre solidarité ainsi qu'à tous ceux qui défendent aujourd'hui leur terre et leur existence contre la spoliation et la colonisation. Le 28 Février 2006, après que le gouvernement Canadien a donné un permis de construire une colonie sur leur terre, le peuple des Six Nations s'y opposa, exigeant la fin de la spoliation et de la destruction de leur terre et de l'empiétement des colons sur leur territoire. Plusieurs d'entre eux sont maintenant poursuivis par des tribunaux Canadiens pour avoir défendu leur terre. Tout ceci nous semble tragiquement familier, en Palestine et à de nombreux autres autour du monde. Depuis plus de 500 ans, les mêmes mécanismes ont été utilisés contre les peuples indigènes, pour les coloniser et les déposséder. Il y a 500 ans, des empires et leurs missionnaires ont répandu le Christianisme et la civilisation avec leurs épées. Aujourd'hui, ces empires et leurs chaînes de TV répandent leur soi-disant "liberté" et "démocratie" avec des bombes à sous-munitions.

La vérité derrière cette "démocratisation" est devenue évidente quand nous avons expérimenté leur démocratie, mais sous l'occupation et l'apartheid Israéliens. La communauté internationale nous a imposé un siège brutal pour nous punir de ne pas avoir choisi leurs candidats pour nous diriger. En tant que Palestiniens, nous sommes toujours les victimes d'un projet colonial et d'un état qui continue à se prétendre la "seule démocratie au Moyen Orient". Le fait qu'il ait été épinglé par le Comité pour l'Elimination de la Discrimination Raciale de l'ONU pour sa politique, et même qu'il ait été accusé de pratiquer une politique d'apartheid par le Rapporteur de l'ONU pour les Droits de l'Homme, ne semble pas le détourner de son statut. Apparemment, seule la technologie s'est améliorée. Après les épées, en Amérique vinrent les accords. Les accords devaient régler les "conflits" territoriaux contre une paix durable. Les violations et les renégociations de ces accords par les colonisateurs - en d'autres termes la continuation de la spoliation territoriale - sont monnaie courante aujourd'hui.


Ici en Palestine, nous faisons face aux mêmes tactiques coloniales. La communauté internationale nous demande d'approuver et de nous conformer à tous les accords signés pour devenir des "partenaires" et être exemptés de l'embargo qui nous est imposé. Une logique absurde qui force ceux qui sont occupés, à passer une série de tests pour pouvoir devenir, à la fin, des partenaires des occupants. Au même moment, Israël, la puissance occupante, n'a jamais respecté aucun des accords qu'elle a signé avec nous, et obtient néanmoins des Traités de Libre-Echange et des honneurs diplomatiques dans le monde entier. Son insoumission n'importe pas. Le peuple Palestinien est pressé de signer de nouveaux accords et compromis pour ranimer le "processus de paix" et les autorités d'Occupation ont déjà clairement fait savoir qu'ils ne seront pas aussi "généreux" que les précédents. Il y a près de 300 ans, quand les peuples indigènes de l'Ile de la Tortue (l'Amérique du Nord) furent parqués dans des réserves, l'Homme Blanc vint enseigner aux nations chasseresses comment utiliser la terre qui n'était pas propice à l'agriculture. Aujourd'hui, après la seconde révolution industrielle, il vient en Palestine apporter les sweatshops (ateliers de misère) et les zones industrielles aux fermiers dépossédés enfermés derrière le Mur de l'Apartheid Israélien. Une initiative de "charité" du Royaume Uni a récemment proposé une nouvelle stratégie pour adapter nos peuples aux ghettos. Pour nos diplômés d'université elle propose d'exporter l'industrie des centres d'appel en Palestine - des emplois non qualifiés, mal payés, sans droit du travail, décentralisé dans différentes villes.

Au cours des siècles, quelque chose a changé. Les puissances coloniales ont mis en place des règles et des institutions qui doivent réguler les relations internationales et conduire à la justice mondiale. Une longue liste de conventions internationales et de lois ont été développées, et la Cour Internationale de Justice a son siège dans un magnifique palais à La Haye. Pourtant, tout ceci ne protège pas les Six Nations, les Palestiniens et les autres peuples occupés et colonisés. La Cour Internationale de Justice (CIJ) a unanimement déclaré le Mur en Cisjordanie illégal, il y a presque 3 ans. Pourtant Israël continue sa construction, 70% en étant déjà achevé. Personne n'a bougé pour faire appliquer cette résolution. Israël fut admis à l'ONU avec l'obligation de respecter les lois internationales et les résolutions de l'ONU. Aujourd'hui, Israël fait fi de douzaines de résolutions et de conventions internationales, et conserve néanmoins son statut de membre à part entière.

Tout récemment, Israël a admis la possession d'armes nucléaires; pourtant Israël n'a jamais autorisé la venue d'inspecteurs de l'ONU, et refuse de signer le Traité de Non-Prolifération Nucléaire. Néanmoins, une guerre totale se prépare contre l'Iran à cause de son programme de développement de l'énergie nucléaire. Au début de l'année, à Herzeliya, les dirigeants néo-conservateurs américains et israéliens ont tenu leur conférence annuelle pour planifier le futur dans la région. A Jérusalem, les autorités d'Occupation distribuent déjà de nouveaux masques à gaz, en prévision du nouveau code de guerre appelé 'Opération Liberté Iranienne'. Dans les faits, le Canada montre une certaine cohérence dans sa politique. Il criminalise ceux sur la terre desquels il a construit sa richesse, pour avoir défendu le peu qu'il leur restait. En même temps, il s'assure que cette logique est respectée mondialement. Il s'est abstenu à l'Assemblée Générale de l'ONU de voter l'acceptation du verdict de la CIJ concernant le Mur de l'Apartheid en Israël; il continue à maintenir les Traités de Libre-Echange avec Israël; il fut le premier état à imposer le siège au peuple Palestinien pour avoir démocratiquement élu ses dirigeants; et il continue à s'aligner sur l'agression par les Etats-Unis et Israël contre les peuples du Monde Arabe. Mais l'espoir existe et il est fort. Vous avez fait face à 500 ans de spoliation territoriale, de massacres et de génocide, mais vous vous battez encore pour votre souveraineté et votre dignité. C'est un message à l'attention de ceux qui, aujourd.hui, attendent notre reddition. 60 ans ne sont pas assez pour oublier notre terre et notre dignité, le temps ne peut pas tuer ces choses là. Réécrire l'histoire ne fonctionne qu'avec ceux qui veulent croire aux mensonges. Bien que nous ayons été dépossédés, nous connaissons notre histoire, nous connaissons le nom de chaque village et ville que nos colonisateurs ont essayé d'effacer, nous nous souvenons de chaque arbre qu'ils ont déracinés, et de chaque rivière et lac qu.ils ont asséchés et pollués.

De la même façon que la mémoire et la dignité du peuple Iroquois dans l'Ile de la Tortue est toujours vivante, 6 millions de réfugiés Palestiniens se battent encore pour retourner dans plus de 500 de leurs villages détruits et victimes de nettoyage ethnique en 1948. Nous ne disons pas cela en tant que survivants d.une époque révolue; notre histoire est encore devant nous. L'avenir ne sera significativement meilleur que le passé que lorsque les peuples du monde seront unis par leur solidarité. L'oppression des colonisateurs ne s'achèvera que lorsqu'ils y seront forcés par les états qui les soutiennent. Si les états qui constituent la communauté internationale ne prennent pas des mesures pour arrêter ces crimes, alors c'est aux peuples qui constituent la société internationale de le faire, et le peuple de Palestine se tiendra toujours aux côtés de ceux qui se battent pour leur liberté et leur dignité.